ABIDJAN-La Côte d’Ivoire est en proie à des violences à relent communautaire et xénophobe consécutives à l’annonce de la candidature d'Alassane Ouattara pour un 3e mandat.
Plusieurs personnes ont été tuées et blessées dans des affrontements entre forces de maintien de l’ordre et opposants au 3e mandat. Par endroit, des boutiques et magasins appartenant à des étrangers ont été la cible de pillage et ou d’incendie. C’est le cas par exemple, à Daoukro et Gagnoua au centre du pays où des Guinéens en ont été victimes.
Le président de la communauté guinéenne de Côte d’ivoire, Sékou Kaba, s’est rendu dans certaines localités. Il fait l’état des lieux du
«désastre économique» dont sont victimes ses compatriotes qui, aujourd’hui, vivent dans une inquiétude. «Vendredi et Samedi 29 août 2020, j’étais à Bonoua pour faire l’état des lieux avec une
délégation de l’ambassade du Mali ou j’ai pu rencontrer les Guinéens victimes, tout comme d’autres nationalités vivant dans ses localités, d'énormes dégâts», a-t-il expliqué.
«Ne pas se mêler à la politique »
Dans le contexte actuel, M. Kaba donne un conseil à ses compatriotes. «Avant tout d’abord, nous avons demandé à nos parents de ne pas se mêler
de la politique ivoirienne parce que ce n’est pas bien. Souvent, il y a de jeunes qui sont au chômage qui, dès qu’il y a émeutes, profitent pour s’attaquer aux boutiques et magasins des autres.
J’ai tout visité. (…) Je ne peux pas expliquer l’étendue des dégâts tellement que les magasins et les boutiques sont pillés même les portes emportées. Je suis en train de faire le point pour
connaitre le nombre des guinéens victimes de pillage parce que ce n’est pas à Bonoua seulement, il y a Daoukoro, Gagnoua et un autre village vers la frontière», explique président des
ressortissants guinéens en Côte d’ivoire.
«Nous avons tout perdu »
M.A.B, est installé depuis 23 ans à Bonoua. Il est l’un des ces Guinéens dont les biens ont vandalisés. «La situation est grave ici. Nous ne
savons pas réellement ce qui va se passer quand les violences vont reprendre. Le combat dépasse un problème ivoirien. Désormais, c’est des étrangers qui exercent légalement dans le pays qui sont
victimes. Ils sont sortis menacer et s’attaquer aux gens. C’est dans cette situation que ma boutique et les biens de plusieurs autres guinéens y compris ceux d’autres nationalités ont été pillés
et ou bruler à Bonoua. Des gens sont venus nous attaquer avec l’argument que l’actuel président a laissé le pays dans les mains des étrangers. Personne n’a pu évaluer ce qu’il a perdu d’abord.
Nous avons tout perdu. Chacun reste chez soi en attendant que la situation s’améliore», témoigne M.A.B sous anonymat par «peur des représailles».Toutefois, précise cet autre compatriote,
I.D « il faut se réjouir qu’il n’y ait eu ni mort, ni blessés graves parmi les Guinéens, pour le moment. (…) Ce n’est pas que des guinéens qui sont touchés. C’est les commerces qui sont
visés dans les pillages. Malheureusement, ici, la majorité de guinéens font le commerce. Ils sont durement touchés à l’intérieur du pays. (…). A Abidjan, pour le moment ça va. Le calme est revenu
après l’intervention des forces de sécurité. Nous demandons aux guinéens d’éviter de passer la nuit dans leurs boutiques. Ce n’est pas une bonne idée dans la mesure des conditions de sécurité du
moment», a déclaré cet autre ressortissant guinéen.
Un risque permanent
A Bonoua, par exemple, souligne le président des ressortissants Guinéens, les étrangers sont, momentanément, interdits d’ouvrir leurs commerces
par mesure de prudence. « C’est désastreux ce qui s’est passé. A Bonoua d’ailleurs, jusqu’à présent les étrangers sont interdits de faire du commerce. Les gens ont tout perdu. Chacun a peur de
venir réparer son magasin. L’assurance ne prend pas en charge. L’Etat ivoirien a promis de faire venir le ministre des Affaires étrangères pour les condoléances et constater l'étendue des dégâts
et éventuellement compenser les opérateurs économiques par rapport aux pertes subies. J’ai demandé les rapports sur les guinéens dans toutes les régions, des images m’ont été envoyées à l’avance.
Nous avons un peu peur parce qu’il y a des leaders politiques et d’opinons qui sont en train de mettre de l’huile sur le feu en provoquant la xénophobie. Au lieu de parler de la politique
ivoirienne, ils s’attaquent plutôt à des étrangers les accusant de complicité avec le pouvoir et tout», s’inquiète Sékou Kaba.
Alpha Ousmane Bah(AOB)
Pour Africaguinee.com
Le 2 septembre 2020