Les militaires qui ont pris le pouvoir en Guinée-Bissau et l'ex-opposition ont annoncé dimanche la dissolution des institutions et la création d'un "Conseil national de transition" (CNT), à la veille de l'arrivée d'une délégation ouest-africaine.
La composition du CNT, le nombre de personnes qui y siégeront et la durée de son mandat doivent être déterminés lundi lors d'une réunion des partis politiques qui présenteront ensuite leurs propositions aux putschistes, a déclaré Fernando Vaz, porte-parole des partis de l'ex-opposition.
Le coup d'Etat du 12 avril illustre une nouvelle fois le rôle majeur et déstabilisateur de l'armée en Guinée-Bissau, pays qui a obtenu son indépendance du Portugal en 1974 après une guerre de libération et est devenu une plaque tournante du trafic de drogue entre l'Amérique du Sud et l'Europe.
La dissolution des institutions et la création du CNT ont été décidées lors d'une longue réunion entre les putschistes et les dirigeants de 22 partis, sur les 35 du pays.
Dans l'attente de la mise en place effective du CNT, deux commissions ont été créées, l'une chargée des "affaires diplomatiques" et l'autre des "affaires sociales" qui gérera les "affaires courantes dans les domaines de l'eau, de l'électricité, etc...", selon un communiqué officiel.
La commission diplomatique doit rencontrer lundi une délégation de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), qui vient à Bissau pour demander un retour à l'ordre constitutionnel.
C'est le jour choisi par l'Union nationale des travailleurs de Guinée-Bissau (UNTG), un des principaux syndicats du pays, pour appeler à une grève générale afin de protester contre le coup d'Etat.
Dimanche matin, une trentaine de jeunes qui manifestaient "pour la paix" et "contre la violence", ont été violemment dispersés à coups de crosse par des militaires.
Le président intérimaire Raimundo Pereira et le Premier ministre Carlos Gomes Junior, candidat de l'ex-parti au pouvoir et favori du second tour de l'élection présidentielle qui était prévu le 29 avril, restaient en détention comme plusieurs dirigeants du parti, dont les familles n'avaient pas de nouvelles.
Le chef d'état-major de l'armée, le général Antonio Indjai, a également été mis aux arrêts, selon la junte. Mais à Lisbonne l'ex-ministre bissau-guinéen des Affaires étrangères, Mamadou Djalo Pires, l'a accusé d'être à l'origine du coup d'Etat, affirmant que l'annonce de son arrestation était "une farce".
Un sentiment largement partagé à Bissau, où journalistes et observateurs jugent que le général Indjai est derrière ces nouvelles convulsions.
Ils affirment que l'Angola, proche des dirigeants renversés, avait prévenu qu'en cas de putsch et d'atteinte à la vie de ces leaders, une liste de ceux qui en seraient responsables serait publiée et qu'ils seraient poursuivis. Le nom du général Indjai aurait été en bonne place sur la liste, selon les mêmes sources, raison pour laquelle il aurait voulu se faire passer pour une victime du coup.
Les putschistes, conduits par le vice-chef d'état-major, le général Mamadu Turé Kuruma, et les patrons de l'armée de Terre, de l'Air et de la Marine, ont justifié leur action en dénonçant "un accord secret" conclu selon eux entre l'exécutif et l'Angola pour "faire éliminer" l'armée par les soldats angolais présents en Guinée-Bissau.
La junte a annoncé qu'elle allait faciliter le départ de ces quelque 200 soldats, décidé par Luanda juste avant le putsch. Mais de source angolaise à Bissau, on précisait dimanche qu'aucun moyen de transport n'avait encore été envoyé de Luanda pour leur retour et que la Cédéao souhaiterait que leur mission soit prolongée.
La Communuaté des pays de langue portugaise (CPLP) a défendu la création d'une "force d'interposition" en Guinée-Bissau, sous l'égide des Nations unies.
Par crainte de violences, le Portugal a dépêché vers Bissau deux navires et un avion militaires afin de préparer une éventuelle évacuation de ses ressortissants.
Écrire commentaire