La fin de Kadhafi : une solution ou un problème ?

Arrivé au pouvoir par un coup d’Etat renversant le roi Idriss originaire de Benghazi, Kadhafi dirigea la Libye d’une main de fer. Se voulant guide d’une révolution la Jamahiriya, il devint puissant et craint et ce pendant 42 ans. Un regard soutenu projeté sur sa vie a permit de voir en lui une personne très ambiguë ; tantôt une terreur, tantôt un très grand ami, un grand frère. Ces deux photographies de lui expliquent ses rapports avec les occidentaux. À un moment donné Kadhafi devint un ennemi à abattre avec les attentats de Lockerbie, l’attentat contre l’avion de la Panam, l’invasion du Tchad, le soutien à plusieurs rebellions au sud du Sahara. Acculé, il va profiter de l’attentat du 11 septembre 2011 sur le World Trade Center à New York, pour changer de fusil d’épaule. Il devient l’ami des occidentaux. Il renonce à son projet d’une Libye puissance nucléaire dans la région, il ouvre son pays aux investissements occidentaux. Il se dressa comme un garant de la lutte contre le terrorisme dans le Maghreb. Les portes de l’occident s’ouvrent alors à lui et on lui déroule le tapis rouge. Erreur de calcul ou simple méprise de sa part. Mais vraiment mal lui en a prit car en politique il n’ya pas d’ancien ennemi, il ya l’ennemi tout court et l’ennemi reste l’ennemi.

Mais qu’est ce qui a pu bien se passé quelques mois après seulement sa réception à l’Elysée par Nicolas Sarkozy ? Sa liquidation est elle une solution au problème Libyen ? Quelle en est la cause et quelles sont les conséquences

I-                    Faire chuter de Kadhafi : un rêve longtemps caressé

Embarrassé depuis quatre décennies par le phénomène Kadhafi, les occidentaux on saisit une grande occasion pour qu’on arrête de parler de lui : les mouvements de contestation et de révolte arabe.

L’équation aurait pu s’avérer bien difficile sans ce mouvement de révolte. Alors ce fut une opportunité inestimable qu’il fallait tout de suite capitaliser. Ils se sont alors saisis de l’appel des opposants mecontents de Benghazi, fief du roi Idriss évincé quatre décennies plutôt, pour finir avec Kadhafi. Pour légitimer leurs actions ils ont envoyé une mission dans la ville éternellement rebelle qui a conclu en ces termes « il se passe quelque chose de très dramatique à Benghazi, Kadhafi est entrain de massacrer son peuple à Benghazi. C’est inacceptable ».

Mais loin de cet argumentaire démolissant dont on a jamais montré des preuves par photographies de morts massifs, n’ya t-il pas d’autres raisons ?

Avant d’entrer dans notre raisonnement, nous précisons que ne défendons pas le vieillard qui a fait 40 ans au pouvoir et qui a servi de parrain à des rebellions sauvages à travers le continent. Ici nous analysons les faits dans un contexte de politique internationale.

D’abord, Kadhafi en tant que homme d’Etat a toujours défié le monde occidental. La dernière défiance en date fut son discours prononcé à l’ONU dans lequel il affirmait que la charte de l’ONU est le signe de l’injustice occidental et que ce papier volant n’avait aucune valeur dans la mesure où ce qui y était écrit, n’était pas respecté par les promoteurs eux-mêmes. Pis il ajoute que le conseil de sécurité de l’ONU était plutôt un conseil de la terreur. L’analyse de ce discours nous a emmené à conclure que le guide libyen venait de signer son arrêt de mort. Non seulement il a abusé du temps qui lui était imparti (1heure 40 mn au lieu de 40 mn) mais il a fait œuvre de sabotage de l’ordre international institué par les vainqueurs après la guerre mondiale de 1945. Concrètement, il a vilipendé le monde occidental et traité sans considération le symbole de leur triomphe qu’est la charte de l’ONU en la jetant en un tourne main pendant l’assemblée générale. Ce fut à coup une insulte et une provocation à laquelle il fallait répondre. L’annonce de la réponse se trouve dans un discours prononcé au début des révoltes arabes par OBAMA où il disait que « nous ne laisserons personne remettre en cause les efforts de temps d’année pour l’instauration d’un monde libre ». Pour donc rendre le coup et lui payer le salaire de l’arrogance, ils étudié la Libye et ont vu qu’ils pouvaient se servir des failles de l’architecture sociologique du pays : les tribus mecontentes depuis l’éviction du roi Idriss. Cette méthode a bien réussi et les résultats sont probants aujourd’hui. Donc les contestations arabes ne furent qu’un argument apparent.

Ensuite, Kadhafi bien qu’ayant accepté l’ouverture de son pays à l’extérieur contrôlait l’entièreté de sa production pétrolière. Les occidentaux n’ayant de main mise sur son pétrole, il fallait l’évincé par le biais du mouvement général de révolte et instituer un pouvoir souple pouvant les faire participer à son exploitation et largement favorable à la gestion occidental du pouvoir politique et économique.

De plus Kadhafi aspirait par cette puissante manne pétrolière a devenir une puissance économique en Afrique. Il fini même par devenir le roi des rois. Arborant son manteau de défenseur de l’unité africaine, il sillonnait le continent, investissant à coup de milliards de dollars dans le pétrole (la compagnie (Oilibya) et les infrastructures économiques et touristiques (des hôtels de hauts standings dans les Capitales africaines). Cette idée de l’unité africaine combattue et crainte depuis des lustres par des occidentaux ne devait pas être encouragée surtout que Kadhafi, ne dépendait pas financièrement d’eux. Il fallait stopper cet autre unitariste arrogant et fière de son pétrole.

Enfin, fort de son potentiel financier, Kadhafi était le père financier de l’Union africaine. A cet effet, il finançait les activités de l’organisation et fournissait des subsides à nombre de chefs d’Etats au sud du Sahara. Craignant qu’il leur monte la tête (chose qu’il faisait déjà), ils ont décidé de le neutraliser. Concrètement, s’il amenait ces derniers temps des présidents à remuer la tête devant les injonctions européens, il y avait de quoi avoir peur. Les occidentaux ayants pour moyens de coercition favoris les sanctions économiques et financières, Kadhafi qu’ils connaissent bien donnait des subsides à ces suspendus qui se tournaient vers lui. Cette pratique mettait à l’eau leurs efforts. Donc, il ne fallait pas encourager cette pratique néfaste à la présence occidental sur le contient. Il était contre la démocratie. Donc, il fallait le liquider car un ennemi même repenti est un ennemi. Chose dite chose faite Kadhafi, le guide, le rebelle, le dictateur, le tyran et l’assassin est mort selon le CNT.

II- La mort de Kadhafi : Le début ou la fin de la Libye ?

L’annonce de la mort de la guide de la Jamahiriya Libyenne suscite des réactions diverses. Les plus poignantes sont celles des dirigeants des pays occidentaux qui ont été le bras armé du CNT. Selon Nicolas Sarkozy « la mort de Kadhafi est une étape importante pour la libération la Libye ». Rasmussen responsable de l’OTAN affirme que « la mort de Kadhafi annonce la fin du règne de peur ». Barack Obama pour sa part expose clairement que « les régimes à poigne sont voués à disparaître ». Et Ban Ki Moon de conclure que « la mort de Kadhafi est une transition historique pour la Libye ». L’ensemble de ces réactions confirment à souhait que l’individu Kadhafi était infréquentable et indésirable. C’est le salaire de son arrogance, de sa témérité à leur égard.

Pour prouver la véracité d’un fait inimaginable il ya quelques mois, les images de Kadhafi mort sont actuellement brandies avec fierté par les medias occidentaux et leurs acolytes du CNT libyen comme un trophée de guerre. Avec un certain triomphalisme, ils se réjouissent à coup de klaxons. La guerre est finie disent-ils. Pour autant devrions nous nous contenter de ces manifestations de joie de la part de ceux qui ont triompher de Kadhafi sans poser un regard critique sur le présent et nous projeter sans risque de nous tromper dans l’avenir de la Libye ?

Aujourd’hui bien de gens se réjouissent de cette nouvelle car elle tourne la page selon eux de longues années de dictature. Ils rêvent d’une Libye libre et paisible. Mais l’assassinat de Kadhafi par l’OTAN[1] est elle le début ou la fin de la Libye ? en ce qui nous concerne nous affichons un certain scepticisme quant à l’avenir de la Libye. Kadhafi, n’était pas l’ennemi de tous dans son pays et dans le monde. Avec cette mort brutale mais longtemps préparée de Kadhafi, la Libye, un pays grandement tribalisé, ne sera pas pacifique et vite pacifiée. Il ya un grand risque de somalisation du pays, les différentes tribus s’excluant mutuellement. De plus ce n’est pas la présence de forces étrangères qui va les en dissuader. C’est une aventure risquée que les libyens du CNT ont entrepris en tuant ou en faisant tuer Kadhafi.

Les occidentaux eux voulant vite profiter du pétrole libyen dans une Libye vite pacifiée, invitent les libyens à bâtir un Etat démocratique (Obama) et leur disent qu’ils ont un devoir de pardon, de réconciliation et d’unité (Nicolas Sarkozy). Mais est ce possible avant l’assassinat de Kadhafi et le trop de sang qui a coulé dans ce pays ?

Loin d’être un oiseau de mauvais augure, je dis ici que la Libye est au bord de la Guerre civile. Même si ce n’est demain, rien ne pourra empêcher.

Suivez la suite avec moi le reste du film………….

 

Un petit mot sur l’union africaine UA. Cette organisation en papier broyée est victime de sa propre turpitude. En dépit du principe de subsidiarité qui laisse à la charge des organisations régionales le règlement pacifique des différends nés dans leurs espaces et que ce n’est qu’en cas d’échec que l’ONU intervient, l’UA a montré qu’elle ne maîtrise pas le droit international et qu’elle ne peut par conséquent, exiger son application. Qui défend-t- elle alors ? Des africains ? Pas si sûr. Elle aurait pu servir d’écran et naitrait une théorie d’organisation écran c'est-à-dire qu’une puissance étrangère ou une organisation ne peut s’immiscer dans une affaire interne d’un Etat particulièrement dans le cadre de la résolution d’un problème qu’en s’adressant à son organisation continentale conformément au principe de subsidiarité sus-évoqué. Mais l’UA par son attentisme, a permit une nouvelle percée occidentale dans la résolution des crises en Afrique. Elle n’avait pas mesuré les conséquences de son acte. Qui peut le plus, peut le moins. En leur permettant de s’immiscer dans les petites crises comme celle qui s’est passé en Guinée, qui a conduit à l’évènement du 28 septembre2009, la tentative d’assassinat du capitaine Moussa Dadis Camara et son transfert forcé à Ouagadougou[2] (le tout applaudi par Jean Ping, elle les encourager à aller faire plus. Aujourd’hui, ils entreprennent la chasse à des présidents (cf. déclaration d’Obama après la chute de Kadhafi« les régimes à poigne sont voués à disparaître ») sans même considérer la position des africains.ils ont



[1] cf déclaration du ministre de la défense française Gérard Longuet dans laquelle il disait à France24 que : « deux avions français ont stoppé le convoi dans lequel se trouvait Kadhafi….un drône americain a bombardé le convoi attaqué par un mirage….les nouveaux dirigeants savent qu’ils nous doivent beaucoup »

[2] Johnnie Carson, l’actuel monsieur Afrique de la maison blanche en sait quelque chose

 

encouragé le CNT à refuser la feuille de route qu’elle leur proposer. Aujourd’hui, on va voir si ce régime inconstitutionnel et désobéissant va siéger à l’UA humilié, sans organiser d’élection.

L’UA dans sa lutte contre les régimes anti constitutionnels est pris à son propre piège. Affaire à suivre.

 

 

                                                                         TEA MARTIAL

                                                                     JURISTE ET DIPLOMATE

                                                                       Marcy.beni@live.fr

 22/10/2011