À la maison de l’Amérique Latine était organisé, le mardi 26 Septembre, un Colloque sur la crise Libyenne par
le Club Géopolitique, l’Institut Robert Schuman et l’Institut Prospective et sécurité en Europe. Thierry Paul Valette porte du Club Géopolitique.
Autour de spécialistes, de journalistes et d’élus, était présente une importante délégation libyenne conduite par Ageli Abdulslam BRENI le
Président du Haut Conseil des tribus et villes de Libye ainsi que l’ancien sous secrétaire général de l’ONU, Lansana Kouyaté et Yamina Benguigui, Présidente de l’institut Robert Schuman et
ancienne ministre de la francophonie. Un colloque pour la paix en Libye est certes un évènement majeur mais il permet de comprendre la crise libyenne et de réfléchir aux moyens de sa
résolution.
Contexte du Colloque :
Entre le 15 février 2011 et le 23 octobre 2011 un conflit issu d’un mouvement de contestation populaire, sur fond de revendications sociales et politiques, s’est déroulé en Libye, principalement
à Benghazi pour s’étendre jusqu’à Tripoli. Cette révolution libyenne s’inscrit dans un contexte de protestation des pays arabes. C’est le « printemps arabe » qui réclame plus de démocratie, de
répartition des richesses et de liberté. Après 42 ans de règne, Mouammar Kadhafi sera assassiné à Syrte le 20 octobre 2011. Un gouvernement de transition est alors mis en place. À partir de 2014,
une deuxième guerre civile opposera trois gouvernements rivaux et des groupes djihadistes. D’anciens rebelles de la guerre civile de 2011 vont alors s’affronter à Benghazi.
L’Union Africaine veut, dans une Libye éclatée, peser de tout son poids pour résoudre cette crise et ne plus être tenue à l’écart des interventions extérieures
sur le dossier. Il en dépend de la stabilité de la Tunisie et du Maghreb et de toute la bande Sahélienne. L’Union Africaine avait d’ailleurs demandé au Président Emmanuel Macron de ne plus mener
d’initiatives parallèles en Libye.Ce dernier est préoccupé par les risque terroristes et migratoires. Une des conséquences de la crise libyenne étant un accroissement important des flux
migratoires.Des flux qui entraînent dans leur sillage, les trafics en tous genres et une fragilité des pays d’Europe face au terrorisme. A Brazzaville, le 9 septembre 2017, une réunion à eu lieu
en présence de l’émissaire spécial pour l’ONU, Ghassan Salamé, et le premier ministre libyen Fayez al-Sarraj.
Dans ce contexte, le Club Géopolitique, l’institut Robert Schuman et l’Institut Prospective et sécurité en Europe ont décidé de l’organisation d’un colloque à la
maison de l’Amérique Latine afin d’échanger des enjeux, des conséquences, mais surtout des solutions à la résolution de la crise libyenne. Les sujets brûlants abordés dans un climat serein, sans
polémique, ont permis le succès de ce colloque autour de spécialistes triés sur le volet.
Déroulement du colloque.
Plus de 170 personnes étaient présentes pour écouter les conférenciers réunis autour de deux tables rondes. Le colloque s’est donc ouvert sur un mot de bienvenue et de présentation des
intervenants.
Ibrahime Sorel Keita, président de BDMTV et vice-président de SOS RACISME et la journaliste Elisabeth Tchoungui annoncent le programme : deux tables rondes avec un temps de parole de 10 minutes
pour intervenir avant chaque séance de questions/réponses.
Yamina Benguigui, présidente de l’institut Robert Schuman et ancienne ministre, leur emboîtera le pas dans un discours introductif suivie de Thierry Paul Valette, président de l’Égalité Nationale et porte parole du Club Géopolitique, qui fera un résumé de la situation en Libye en quelques dates clefs.
Composition de la première table ronde modérée par Ibrahim Sorel Keita.
– Ageli Abdulslam BRENI, Président du Haut Conseil des tribus et villes de Libye
– Hélène BRAVIN, Journaliste, auteur « Kadhafi vie et mort d’un dictateur »
– Lansana KOUYATE, Ex Premier Ministre Guinée et ancien sous secrétaire de l’ONU
Delphine O, Députée LREM de la 16éme circonscription de Paris
Composition de la seconde table ronde modérée par la journaliste Elisabeth Tchoungui.
– Thierno CAMARA Président du Forim
– Mohamed ABBOU, Écrivain, Ancien Ministre
– Ghaleb BENCHEIKH, Président de la Conférence Mondiale des Religions pour la paix, Journaliste, Ecrivain.
– Michèle André ,sénatrice et ancienne ministre.
CE QUE NOUS DEVONS RETENIR DES INTERVENTIONS:
Ageli Abdulslam BRENI
Il ouvre fort cette première table ronde. Selon lui « Nicolas Sarkozy est à l’origine de la destruction de la Lybie »Ses premières analyses sont sans appel et démontrent les enjeux et responsabilités de cette crise libyenne qui vont bien au-delà de certaines velléités locales des tribus.
Il réaffirme les responsabilités collectives de la France, du Qatar, de la Turquie, et de la Grande-Bretagne. Il interpelle la démocratie française puisque l’OTAN ,à laquelle appartient la France, a bombardé la Libye pendant près de 8 mois. Il attend toujours des excuses de la part du Président français mais sans aucune rancune ni esprit de vengeance.
Selon Ageli Abdulslam BRENI, le temps viendra pour rendre des comptes mais pour l’heure l’important est de se concentrer sur la résolution de la crise: « nous voulons reconstruire le pays et l’État de droit » Malgré tout, il s’interroge : « je ne comprends pas pourquoi les occidentaux ont poussé la Lybie dans les mains des milices qui servent le terrorisme en Europe ».
Satisfait que l’Union Africaine ait le dossier en mains, il espère néanmoins que le président E.Macron sera présent au mois de décembre à la réunion de réconciliation nationale prévu à Addis-Abeba.
Helène Bravin
Elle se montre sévère puisque selon elle l’ONU: » ne sanctionne pas quand il faut et sanctionne quand il ne faut pas »
Elle rappelle l’élection législative peu suivie par les électeurs avec 13% de participation conclue par l’assassinat d’une figure des droits de l’homme, l’avocate libyenne Salwa Bugaighis.
Elle semble remettre en cause l’efficacité de l’Union Africaine: « Sera-t-elle capable de régler la crise et de discuter des accords ? » Elle suggère que le haut comité de l’Union Africaine passe de 9 à 3 membres.
Lansana KOUYATE
Après de chaleureux remerciements adressés aux organisateurs du colloque, il demande si l’Union Africaine est capable de dénouer la crise en Libye. Sa réponse est claire : « oui elle le peut et le doit par son acte constitutif. Elle a des organes pour cela ». Sa réflexion sur la mission de l’Union Africaine est très pragmatique. Selon lui l’Union Africaine est contournable si « l’Afrique se laisse contourner », si « les Africains assistent comme des étrangers au règlement des affaires africaines ».
L’Afrique doit de toute évidence s’imposer et prendre son destin en main. Cependant il n’oublie pas de rappeler devant une assemblée attentive l’embargo de 1992 qui interdisait de survoler la Libye ainsi que la 34e session ordinaire en août 1998 tenue à Ouagadougou concernant la désobéissance civile collective » à l’égard du Conseil de sécurité de l’O.N.U.
Delphine O
Elle intervient après Lansana Kouyate au pupitre pour exprimer la positon de la présidence française qui veut jouer pleinement un rôle de médiation et de concertation avec l’Union Africaine. La France ne fera aucune ingérence qui compromettrait la bonne résolution de la crise libyenne.
Cette première table ronde a parfaitement démontré l’urgence et la nécessité de la médiation de l’Union Africaine. Au coeur de la seconde table ronde, les 4 intervenants ayant dénoncé eux aussi les origines et les conséquences de la crise mettent l’accent sur d’autres aspects.
Michèle André
La femme est au coeur de son intervention avec efficacité et sobriété. Michèle André introduit son argumentaire par « le camouflet subi par la chancelière Allemande Angela Merkel suite aux dernières élections» où plus d’un million et demi de votants ont boudé les partis démocratiques au profit de l’extrême droite. L’évolution des flux migratoires en Allemagne y étant pour quelque chose.
S’appuyant sur son expérience parlementaire, l’ancienne ministre de Francois Mitterand pose la problématique des femmes qui selon elle: »doivent assurer la survie de la famille et sont victimes du fait guerrier ». Le parcours des femmes immigrées est redoutable . Elles doivent faire face aux viols multiples, doivent se soumettre à la prostitution pour survivre.
De toute évidence, la Libye a besoin de toutes les instances pour la résolution
de la crise et notamment « au niveau de la bande du Sahel où de nombreux trafics sèment la discorde ». Pour Michèle André, « le Niger, le Mali, la Mauritanie et la Libye se retrouvent dans la
même situation ».
Thierno CAMARA
À la question : « faut-il repenser les flux migratoires ? » il précisera que plus de 1000 associations s’affairent sur le terrain pour venir en aide aux populations migratoires. Il n’hésitera pas
à pointer du doigt les
institutions : « c’est un véritable échec de toutes les institutions ». Il dénonce le projet de vouloir installer des zones de frontières dans les zones de libre circulation.
Son analyse est sans appel : « ce ne sont pas les plus démunis qui migrent puisque migrer coûte beaucoup d’argent ». Sa conclusion sans équivoque est un message envoyé aux responsables politiques de la planète : « la migration qui représente moins de 3% de la population de la planète bouleverse l’ordre politique établi ». Le seul refuge se fera dans la solidarité à ses yeux, à condition de ne pas en faire seulement une affaire de spécialistes mais d’y associer tout le monde.
Mohamed ABBOU
L’Algérie sera au coeur de son intervention rappelant à l’auditoire que la sécurité de l’Algérie n’est pas en Algérie mais en Libye, en Irak et en Iran. Des périodes sombres de l’Algérie à la réconciliation nationale, il rappellera l’adoption en septembre 2005 de la « charte nationale de réconciliation ».
À ce jour elle est toujours en vigueur. Il n’hésitera pas à faire le parallèle avec la situation en Libye : « une économie en berne, un pays divisé et isolé »
Ghaleb BENCHEIKH
Selon lui se pose la question de la culture de la paix comme un devoir sacré. Il pointera la responsabilité du Président Sarkozy et du premier ministre britannique James Cameron dans les deux guerres civiles libyennes.
Une sortie de crise ne peut se faire qu’en prenant en compte la femme libyenne porteuse d’une vision de paix perpétuelle comme affirmé dans l’Acte constitutif de l’Unesco « Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être érigées les défenses de la paix ».
ÉPILOGUE
L’ancien sous secrétaire général de l’ONU et ancien premier ministre de Guinée, Lansana Kouyaté insistera le rôle prépondérant de l’Union Africaine dans la résolution de la crise. Les États
membres devront malgré tout composer au-delà des intérêts personnels de chacun.
En conclusion Yamina Benguigui remerciera les intervenants et les nombreux invités de ce colloque.
Thierry Paul Valette
Porte parole du club géopolitique
Président de l’Égalité Nationale. : www.egalitenationale.com
PAR THIERRY PAUL VALETTE BLOG
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