Teodorin Obiang n'a eu de cesse de contester la légitimité de la justice française. Ce vendredi, cette dernière l'a condamné à trois ans de prison avec sursis et 30 millions d'euros d'amende avec sursis pour blanchiment d'abus de biens sociaux, détournement de fonds publics, abus de confiance et de corruption.
Dans l'affaire dite des «biens mal acquis», le tribunal a également ordonné la confiscation des biens du vice-président de Guinée équatoriale, qu'il a obtenu de façon frauduleuse. Cette peine est inférieure à celle requise par le parquet national financier qui avait demandé trois ans de prison ferme et une amende ferme de 30 millions d'euros.
«Une décision militante», a dénoncé la défense. «Nous allons examiner tous les recours possibles», a déclaré devant la presse l'avocat de Teodorin Obiang, Emmanuel Marsigny.
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L'enquête, ouverte après des plaintes des associations Sherpa et Transparency International, avait mis au jour le patrimoine considérable de Teodorin Obiang qui est le fils du président de Guinée équatoriale Teodoro Obiang Nguema: objets d'art, voitures de luxe et de sport, et un somptueux hôtel particulier de l'avenue Foch(estimé à lui seul à 107 millions d'euros) avec 101 pièces, hammam, discothèque, marbre et robinets recouverts d'or.
Voitures de luxe, hôtel particulier et objets d'art
Au terme de l'instruction, les juges avaient estimé que son patrimoine ne pouvait avoir été financé par ses seuls revenus officiels mais était issu «des détournements de fonds publics», de la corruption. Nombre de ces dépenses excessives étaient effectuées par le biais de la Somagui Forestal, une société d'exploitation forestière. Une «coquille vide qui ne sert qu'à faire transiter de l'argent public» et à collecter un «impôt révolutionnaire», selon l'accusation. D'après le procureur Jean-Yves Lourgouilloux, ses dépenses illégales en France s'élèvent à plus de 150 millions d'euros.
«Une ingérence dans les affaires d'un État souverain»
Au dernier jour d'audience, la défense de Teodorin Obiang, qui n'a pas assisté à un seul des 18 jours de procès, avait dénoncé une «ingérence dans les affaires d'un État souverain». Elle estimait que pour le blanchiment, la justice française devait juger si l'argent qui a servi à financer tous ses achats a une origine licite ou non, ce qui revient à «conférer à la France une compétence universelle». Elle s'était par ailleurs défendue en déclarant que l'hôtel particulier de l'avenue Foch servait de locaux diplomatiques, donc inviolables.
Vendredi, le tribunal a rétorqué qu'il était compétent pour le juger car il ne traitait que de «l'infraction de blanchiment commise en France» par le dignitaire pour son usage «personnel», et non «des faits commis en Guinée équatoriale» par Teodorin Obiang «dans l'exercice de ses fonctions».
L'accusé a néanmoins contesté les poursuites françaises devant la Cour internationale de justice. La confiscation de ses biens devra donc attendre l'issue de cette procédure, en décembre par la Haye (Pays-Bas). L'homme de 48 ans est également inquiété par la justice suisse, qui s'intéresse à onze véhicules de luxe lui appartenant, saisis à Genève en novembre.
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Teodorin Obiang est le premier dignitaire à être jugé dans le cadre des procédures
dites des «biens mal acquis» lancées en 2010 en France. Mais la justice française s'intéresse également à d'autres personnalités africaines. Elle enquête
actuellement sur
des proches du président congolais Denis Sassou Nguesso (Congo), du défunt Omar Bongo (Gabon) ou encore du président centrafricain
déchu François Bozizé.
Par Esther
Paolini
lefigaro.fr
Le 28 octobre 2017
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