« L’Algérie cherche à humilier la France » : Bruno Retailleau dénonce le renvoi sur le sol français d’un influenceur algérien qui avait été expulsé

Un homme de 59 ans, surnommé « Doualemn » sur TikTok, avait été interpellé à Montpellier après une vidéo contenant un appel à la violence, puis expulsé vers l’Algérie. Mais Alger l’a finalement renvoyé en France jeudi soir.

« L’Algérie cherche à humilier la France », a estimé vendredi 10 janvier le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, au lendemain du renvoi sur le sol français d’un influenceur algérien qui avait été expulsé vers l’Algérie après la publication d’une vidéo appelant à la violence. « Je pense qu’on a atteint avec l’Algérie un seuil extrêmement inquiétant », a ajouté le ministre, qui s’exprimait lors d’un déplacement à Nantes.

Cet influenceur – surnommé « Doualemn » sur TikTok – avait été interpellé dimanche à Montpellier puis expulsé vers l’Algérie jeudi, avant donc d’être finalement renvoyé vers la France dans la soirée. Alger l’a « interdit de territoire », a expliqué une source policière à l’Agence France-Presse (AFP), confirmant une information de l’hebdomadaire Valeurs actuelles, qui la tenait du ministère de l’intérieur.

Cet homme de 59 ans avait été arrêté après une vidéo publiée sur TikTok contenant un appel à la violence. Placé mardi en centre de rétention administrative à Nîmes, il avait été conduit à Paris jeudi après-midi, d’où il est parti en avion vers l’Algérie, selon son avocat, Jean-Baptiste Mousset. Mardi, le procureur de la République de Montpellier, Fabrice Belargent, avait annoncé que cet homme serait jugé le 24 février pour « provocation à commettre un crime ou un délit », sans pour autant le placer en détention provisoire ni sous contrôle judiciaire.

« J’ai pris un arrêté d’expulsion et les autorités algériennes n’ont pas voulu le laisser débarquer sur le sol algérien, en contradiction totale avec les règles », a déploré M. Retailleau. « Je pense que la France ne peut pas supporter cette situation », a-t-il ajouté, appelant à « évaluer tous les moyens qui sont à notre disposition vis-à-vis de l’Algérie » pour « défendre nos intérêts ».

« Notre client fait les frais d’une action administrative particulièrement répressive », a déclaré vendredi l’un des avocats de l’influenceur, Me Jean-Baptiste Mousset, lors d’une conférence presse à Montpellier. « Nous ne souhaitons pas que les résidents algériens en France deviennent les fusibles des relations diplomatiques entre l’Algérie et la France. »

Deux autres Algériens ont été récemment interpellés, l’un à Echirolles, près de Grenoble, l’autre à Brest, pour avoir mis en ligne des contenus appelant à des actes violents, souvent contre des opposants au régime algérien.

Messages de haine

Jeudi, une tiktokeuse franco-algérienne cinquantenaire, Sofia Benlemmane, a été placée en garde à vue à Lyon pour « menaces de mort et provocation publique à la haine », a signalé à l’AFP le procureur de la République de la ville, Thierry Dran. Selon une source policière, il lui est reproché d’avoir diffusé des messages de haine et des menaces contre des internautes, et plus généralement contre toutes les personnes susceptibles de s’opposer au régime algérien, ainsi que des déclarations insultantes envers la France. Vendredi, le procureur de Lyon a fait savoir que l’enquête et la garde à vue de Mme Benlemmane allaient se poursuivre au moins jusqu’à samedi.

Lundi, la préfecture du Rhône avait annoncé avoir effectué des signalements visant trois influenceurs de Lyon, dont Sofia Benlemmane, et deux autres tiktokeurs connus sous les pseudonymes « Abdesslam Bazooka » et « Laksas06 ».

Selon plusieurs opposants algériens en France, interrogés par l’AFP, ces messages particulièrement violents se sont intensifiés après que la France, ex-puissance coloniale, a changé de doctrine concernant le Sahara occidental. Sur cette question, Emmanuel Macron s’est aligné à la fin de juillet sur l’Espagne et les Etats-Unis, estimant que l’avenir de ce territoire s’inscrivait « dans le cadre de la souveraineté marocaine ». Ce qui a entraîné un réchauffement avec Rabat et une nouvelle crise avec Alger.

 

Autre sujet de tension entre les deux pays, sur lequel s’est exprimé Bruno Retailleau : le sort de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, 75 ans, incarcéré depuis la mi-novembre en Algérie pour atteinte à la sûreté de l’Etat, et qui se trouve dans une unité de soins depuis la mi-décembre. « Est-ce qu’un grand pays peut s’honorer de maintenir en détention pour de mauvaises raisons quelqu’un qui est malade et âgé ? », a demandé M. Retailleau.

lemonde.fr

Le 10 janvier 2025

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