Au Sénégal, l’opposition manifeste pour la première fois depuis le report de la présidentielle

Le président Macky Sall a annoncé le report du scrutin du 25 février au mois de décembre, déclenchant une grave crise. Depuis, cette décision a été invalidée par le Conseil constitutionnel.

A Dakar, des milliers d’opposants ont pu manifester samedi 17 février. Il s’agit de la première marche autorisée depuis l’annonce, il y a deux semaines, par le président, Macky Sall, du report de l’élection présidentielle du 25 février. Cette décision a ensuite été invalidée par le Conseil constitutionnel.

Portant des tee-shirts au nom du collectif de la société civile ayant appelé à la marche, Aar Sunu Election (« protégeons notre élection »), ou des drapeaux aux couleurs du Sénégal, les manifestants brandissent des pancartes sur lesquelles on peut lire, entre autres : « Respect du calendrier électoral », « Non au coup d’Etat constitutionnel », « Free Sénégal ».

Les gendarmes ont quadrillé tout le secteur de la marche, mais, contrairement aux précédentes manifestations, interdites, ils ne portaient pas de tenues antiémeutes, ont constaté les journalistes de l’Agence France-Presse.

L’opposition criait au « coup d’Etat constitutionnel » à la suite de la décision de Macky Sall de reporter l’élection présidentielle au 15 décembre. Depuis la décision, jeudi, du Conseil constitutionnel d’invalider le report de l’élection et d’exiger qu’elle se tienne « dans les meilleurs délais », ce qu’a accepté le président Macky Sall, la situation s’est apaisée, comme en témoigne l’autorisation de cette manifestation.

« Surveiller le déroulement du calendrier républicain »

« Le mot d’ordre aujourd’hui, c’est la mobilisation », déclare Malick Gakou, candidat à la présidentielle, qui participe à la marche. « L’Etat du Sénégal n’a plus le droit à l’erreur et il doit organiser l’élection au mois de mars pour que la passation de service entre le président Sall et le nouveau président puisse se faire le 2 avril », date de la fin du mandat du chef de l’Etat.

« Macky Sall dictateur », « Libérez Sonko », a scandé la foule d’hommes, de femmes et d’enfants, dans une ambiance de fête. Bien qu’absent, Ousmane Sonko, leader de l’opposition emprisonné, très populaire auprès des jeunes, est omniprésent parmi les marcheurs qui chantent la célèbre chanson Sonko namenala (« Sonko, tu nous manques »).

A la fin de la marche, Aar Sunu Election a appelé dans un communiqué à « continuer la mobilisation en restant alertes, pour surveiller le déroulement intégral du calendrier républicain selon les dispositions légales ». Les précédentes manifestations organisées pour s’opposer au report et au vote de députés fixant la date du scrutin au 15 décembre, toutes interdites, avaient donné lieu à des violences et de nombreuses arrestations. Trois personnes avaient été tuées les 9 et 10 février.

L’Union africaine appelle à des élections libres

Le président de la commission de l’Union africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, a souhaité samedi la tenue d’« élections inclusives, libres et transparentes » dans les meilleurs délais au Sénégal. « La situation au Sénégal, pays modèle en matière de démocratie, nous préoccupe au plus haut point », a déclaré Moussa Faki Mahamat à l’ouverture du sommet de l’UA.

Il a salué « la position du gouvernement sénégalais de prendre en haute considération » la décision du Conseil constitutionnel. Il a souhaité un « plein succès aux consultations engagées par le gouvernement pour décider dans un esprit consensuel la meilleure voie pour l’organisation d’élections inclusives, libres et transparentes » dans les meilleurs délais.

Le chef de l’Etat sénégalais s’est engagé vendredi à organiser la présidentielle « dans les meilleurs délais », en respectant l’avis du Conseil constitutionnel. Sa décision, au début de février, de reporter à la dernière minute le scrutin du 25 février au mois de décembre avait déclenché la pire crise que le Sénégal ait connue depuis des décennies.

 

 

Au pouvoir dans ce pays d’Afrique de l’Ouest depuis 2012, M. Sall avait affirmé ajourner les élections en raison de différends concernant la disqualification de candidats potentiels et de la crainte d’un retour aux troubles observés en 2021 et en 2023. L’opposition le suspectait de vouloir se maintenir au pouvoir par cette décision.

 

lemonde.fr

Le 18 février 2024

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