Six jours après le coup d’Etat contre le président Mohamed Bazoum, le premier avion devrait décoller de Niamey aux alentours de 16 heures.
C’est une opération délicate qui vient de s’engager. « Compte tenu de la situation à Niamey, des violences qui ont eu lieu contre notre ambassade avant-hier [dimanche 30 juillet] et de la fermeture de l’espace aérien, qui laisse nos compatriotes sans possibilité de quitter le pays par leurs propres moyens, la France prépare l’évacuation de ses ressortissants et des ressortissants européens qui souhaiteraient quitter le pays », a indiqué le ministère des affaires étrangères dans un communiqué mardi.
« L’évacuation est effectivement en cours », confirme au Monde Michèle Peyron, députée Renaissance (Seine-et-Marne) et présidente du groupe France-Niger à l’Assemblée nationale. Six jours après le coup d’Etat commis contre le président Mohamed Bazoum, mercredi 26 juillet, le premier avion devrait décoller de Niamey aux alentours de 16 heures, heure de Paris.
Selon le Quai d’Orsay, il y avait environ 1 200 ressortissants français présents au Niger en 2022. « Comme nous sommes en période de vacances scolaires, beaucoup sont rentrés en France, estime Michèle Peyron. Ils seraient actuellement environ 600 sur le territoire nigérien. Les militaires français doivent évacuer ceux qui le veulent avec l’armée nigérienne, et plus précisément avec la garde nationale. Celle-ci doit sécuriser les convois du point de ralliement jusqu’à l’aéroport. »
L’évacuation totale des ressortissants français devrait prendre plusieurs jours. « Les liaisons intérieures étant fermées, ceux qui ne vivent pas dans la capitale doivent s’y rendre et cela peut être long, observe Michèle Peyron. Pour aller d’Agadez à Niamey par la route, il faut compter une journée. » Les autorités françaises n’ont pas voulu préciser quel sera l’avenir immédiat des quelque 1 500 militaires déployés dans le pays. Paris avait fait du Niger le cœur de son dispositif militaire au Sahel.
L’Allemagne a recommandé mardi « à tous ses ressortissants à Niamey d’accepter l’offre » de la France de les évacuer. Selon le ministère allemand des affaires étrangères, moins de 100 ressortissants allemands – qui ne travaillent ni pour l’ambassade, ni pour l’armée – se trouvent dans le pays. La cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, a par ailleurs indiqué que l’ambassade allemande à Niamey « poursuivrait son travail ». De son côté, le ministre italien des affaires étrangères a annoncé avoir affrété un avion spécial pour ses ressortissants souhaitant quitter le Niger.
« On se prépare depuis un moment »
Selon Michèle Peyron, les évacuations des Occidentaux ont débuté « dans le calme ». « Les ressortissants ne sont pas inquiets », confirme Sophie Lassan, présidente de la section nigérienne de l’Association démocratique des Français à l’étranger (ADFE) et enseignante au lycée français La Fontaine de Niamey : « La situation sécuritaire est tendue depuis longtemps au Niger, on se prépare depuis un moment à vivre cette situation. »
Une partie des Français présents au Niger travaillent pour des fleurons de l’industrie comme Veolia, Air France et Orano (ex-Areva). Ce dernier concentre l’essentiel des intérêts économiques français dans le pays et compte des participations au côté de l’Etat nigérien dans trois mines d’uranium du nord. Une dizaine de collaborateurs pourraient être concernés par ce départ précipité. « Les activités opérationnelles se poursuivent. La présence des expatriés ne conditionne pas la continuité des activités », explique la porte-parole du groupe, rappelant que 99 % des collaborateurs sont Nigériens.
Le départ des ressortissants français ne devrait pas avoir d’impact immédiat sur l’approvisionnement énergétique de la France. Une seule des trois mines d’uranium exploitées par Orano, la Société des mines de l’Aïr (Somaïr), est en production. Ses rendements sont déclinants, la mine étant en fin de vie, même si le groupe tente de prolonger son exploitation. Elle ne couvre par ailleurs que 10 % environ des besoins des centrales nucléaires françaises.
« La situation au Niger ne présente aucun risque sur la sécurité d’approvisionnement de la France en uranium naturel », affirme le ministère de la transition énergétique. « Après les questions sur la continuité de l’approvisionnement en uranium naturel de la Russie et des deux pays sous son influence, le Kazakhstan et l’Ouzbékistan, la crise au Niger est un nouveau rappel des failles du mythe de l’indépendance énergétique par le nucléaire », remarque de son côté Mycle Schneider, expert international indépendant en politiques énergétiques et nucléaires.
L’ultimatum de la Cédéao
Cette évacuation intervient après le coup d’Etat contre Mohamed Bazoum. Le chef d’Etat déchu est toujours séquestré dans sa résidence présidentielle par les hommes du général Tiani, ex-chef de la garde présidentielle, qui a pris la tête du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP).
Lemonde.fr
Le 1er juillet 2023
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